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Journée nationale du souvenir des victimes et des héros de la déportation

Le dernier dimanche d’avril est la journée nationale du souvenir des victimes et des héros de la déportation. Une journée très peu présente dans les médias mais encore très marquée dans les souvenirs des français.

A Publier, cette commémoration a eu lieu place Jean Moulin en collaboration avec la FNDIRP, sous la présidence du maire Jacques Grandchamp, en présence des familles de déportés, du conseiller départemental Nicolas Rubin, de l’ancien maire de la commune Christian Bourdel, des conseillers municipaux, d’élus locaux, de la protection civile, des porte-drapeaux et de la population.

La cérémonie s’est ouverte avec la mise à l’honneur de Guillaume Pachoud, petit fils d’ancien résistant, nouveau porte drapeau de la FNDIRP Chablais, depuis cette année.

La lecture du message national, rédigé par les associations qui portent ce devoir de mémoire, a été lu par Françoise Vason, fille de déporté. >>>

Le maire, Jacques Grandchamp, a exprimé d’une voix ferme la vision qu’il porte sur le rapport d’une telle commémoration au regard de l’actualité du monde.

« Chaque année, nous écoutons avec recueillement et émotion le poignant Chant des Marais… la chanson de Jean Ferrat Nuit et Brouillard… Tout est dit de la folie humaine… des comportements que les animaux n’auront jamais… L’histoire se répète dans ce qu’elle a de plus vil. Depuis plus d’un an, l’horreur se déchaine toujours en Ukraine. Deux peuples, pourtant unis par les mêmes racines, la même culture, la même religion, la même langue, qui ont vécu en commun les horreurs de la deuxième guerre mondiale, connaissent aujourd’hui la terreur et la désolation.

Après la guerre en direct sur les plateaux télévisés… nous sommes aujourd’hui dans l’indifférence… Dans ce pays qui se targue de donner des leçons de droits de l’homme au monde entier, sans être en capacité d’apporter la concorde sur son territoire… nous devons inlassablement rappeler le souvenirs de nos déportés pour épargner à nos enfants et petits-enfants, la cruauté de leur sort ».
Allocution complète >>>

François Vason, accompagné de son épouse Françoise, a fait l’appel des déportés de la commune.

Françoise Vason, fille de Joachim Cottet déporté, raconte :
« En ce jour, je suis vraiment en communion avec mon papa. Il nous parlait très peu de cette période où il était déporté. Il nous donnait des anecdotes, il nous disait qu’il ne fallait surtout pas jeter le pain, finir son assiette, et nous rappelait sans cesse : « j’ai tellement eu faim »

Mon papa a été arrêté le 25 Décembre 1943 au Château d’Habère-Lullin. Cette tragédie a fait 31 victimes : 25 fusillées sur place, 8 sont parties en déportation, deux sont revenues dont mon papa.

Il a été interné dans les camps suivants : Buchenwald – Flossenburg, Hersbruch, commando d’extermination puis Dachau où il fut libéré le 29 Avril 1945 vers 17 h.

C’est lors du 50e Anniversaire de cette tragédie en décembre 1993, que mon mari, François, échange avec mon papa en lui demandant d’écrire ce passé douloureux pour laisser une trace à ses petits-enfants et aussi à nous les enfants qui ne savions pas grand chose.

Il ne voulait pas du tout se lancer dans cette démarche par crainte de revivre tout ça. Nous avons été confrontés à un refus.

Et puis je continue d’insister auprès de Papa. Mes parents passaient l’hiver dans le sud, je lui ai dit qu’il pourrait tout du moins commencer à écrire. A son arrivée à Menton, il m’a dit qu’il voulait bien essayer et se laisse finalement convaincre.

C’est à ce moment-là que je lui ai proposé un fil conducteur. Nous avons beaucoup échangé et il me tenait au courant de l’avancée de son travail ; il m’envoyait régulièrement par courrier des feuillets que je tapais au fur et à mesure. C’est là que J’ai vraiment pris conscience de sa grande souffrance. Je pensais que cet exercice pourrait l’aider à évacuer cette peine qu’il a gardée au fond de lui toute sa vie, comme la plupart des déportés.

En février, nous sommes partis les rejoindre pour une semaine de vacances.

Et là, il m’a annoncé en pleurant qu’il ne pouvait pas continuer, c’était trop difficile à revivre. Il a vu ma déception et je m’entends lui dire « papa si tu penses que ce n’est pas important de nous laisser une trace, ne continue pas ». Je regrette aujourd’hui mes paroles car j’ai compris bien après, ce que je lui avais demandé. Et puis lors d’une promenade en bord de mer, mon papa a dit à mon mari qu’il allait s’y remettre pour nous.

A leur retour en mars, papa est rentré et m’a remis ses derniers feuillets.

Nous lui avons rendu le manuscrit finalisé le 29 Avril 1994, jour anniversaire de sa libération. Il est inestimable pour nous et lui en sommes infiniment reconnaissants.

Il est tombé malade en 1995 et décédé en 2002.

Les déportés n’ont pas parlé à leur retour en France de crainte de ne pas être crus. Quelques années après, des déportés ont expliqué ce qu’ils avaient enduré dans les camps. Beaucoup ont témoigné dans les écoles et la parole s’est libérée.