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Lyudmyla se mobilise pour son pays l’Ukraine

« Aux vues des circonstances, je veux faire mon spectacle de fin d’année pour soutenir l’Ukraine ». C’est la volonté de Lyudmyla, Ukrainienne d’origine, de l’association « Danse avec Lyudmyla ».

Information sur le spectacle de l’association danse avec Lyudmyla >>>

Coordonnées de Lyudmyla : metla2005@gmail.com 06-87-45-83-60
Toute proposition d’aide est la bienvenue.

Lyudmyla nous reçoit pour nous parler de son spectacle de fin d’année qu’elle produira avec son association à l’espace Tully le dimanche 10 avril. Nos questions se dirigeront rapidement vers l’actualité qui se déroule dans son pays.

Quelles sont vos motivations pour offrir ce spectacle en soutien à l’Ukraine ?
« En 2017, j’avais invité les enfants ukrainiens à venir présenter leurs danses à Thonon. Je les avais logés sous tentes à la maison. Aujourd’hui, ça me fait mal au cœur quand je pense à eux. Ils sont maintenant dans les sous-sols en Ukraine. Certains ont déjà disparu. Je ne voyais pas comment je pouvais faire pour aider tous ces enfants. Quand ils sont venus en 2017 ils avaient présenté une danse contre la guerre, car c’était déjà la guerre dans le Donbass en Ukraine. C’était une chanson en Russe avec une partie en anglais sur la fin qui disait que tous les enfants du monde ont le droit de vivre leur vie. Ils sont tous contre la guerre. Ils ne peuvent pas dire aux adultes qu’il faut arrêter mais ils interpellent les autorités : Qu’est-ce que vous faites ? Réveillez-vous !
C’est en leur honneur que j’ai créé une danse pour ces enfants qui se sont élevés contre la guerre au Donbass et qui se retrouvent maintenant avec la guerre chez eux. Je crains pour la culture de nos pays et surtout pour la culture russe. Il ne faudrait pas détruire tout cela parce que c’est russe, arrêter d’écouter Tchaïkovski ou supprimer les ballets russes simplement parce qu’on a pu ressentir de la haine contre ce pays. »

En dehors des paroles, comment comptez-vous soutenir l’Ukraine ?
« J’ai accepté de venir en aide à 13 personnes qui ont quitté l’Ukraine. Elles font partie de mes amis. Ce sont des femmes mariées qui viennent avec leurs enfants. Les maris sont restés au pays. Le spectacle sera payant, car il faut récolter de l’argent pour le quotidien de ces réfugiés afin qu’ils ne dépendent pas de nous, qu’ils trouvent une indépendance. Ils ont besoin de vivre dans la dignité. Un Ukrainien n’a pas pour habitude de mendier. Ce n’est pas dans son caractère. Je ne sais pas encore de quoi ils auront besoin, mais il faut se préparer rapidement car ce dimanche 6 mars, ils sont déjà en Roumanie. »

Lyudmyla, vous êtes née en France ?
« Pas du tout, ma mère m’a mise au monde en 1983 au sud du pays, dans la ville de Nikolaiev. Une ville pro-russe d’ailleurs. Mon enfance correspondait à celle des autres. Le pays était dans la pauvreté. Il n’y avait pas grand-chose dans les magasins : Patates, pates, saucissons et poissons salés. Mon père est décédé quand j’étais encore enfant.
En 91 avec l’Union Soviétique qui s’est effondrée, on a tout perdu ce qu’on avait réussi à mettre de côté.… Ma maman a dû aller travailler en Pologne pour assurer notre vie. Elle est docteur pédiatre, elle s’est résignée à aller vendre de la marchandise de bonne qualité de l’autre côté de la frontière. Les voyages se faisaient en bus avec des rackets organisés sur le parcours. Mais elle arrivait à ramener 2 ou 3 sous ou parfois c’était des échanges.
Je me souviens de la fois où elle a ramené 2 bananes qu’on a partagées avec ma copine. C’était la première fois que je voyais ce fruit. Mais le plus beau cadeau qu’elle m’ait apporté, ce fut ma poupée Barbie.
C’était une période difficile. On ne change pas la mentalité des dirigeants aussi simplement. L’ancien système avait du mal à se transformer. On dépendait toujours de la Russie au début. Il a fallu changer plusieurs fois de monnaie en passant par les coupons à découper aux ciseaux, avant d’arriver à la hryvnia, la monnaie d’aujourd’hui.
La liberté s’est offerte aux Ukrainiens qui peu à peu sont sortis de leur pays pour découvrir le monde, faire des études, trouver du travail en Europe pour ramener des sous en Ukraine, construire sa maison et vivre décemment.
Je suis allée à l’école nationale de danse d’Ukraine à 12 ans tout en continuant mes études. Puis en 1998, ce fut le célèbre Ballet national d’Ukraine Virsky où on représentait la culture Ukrainienne dans le monde entier. Ce furent mes premières découvertes du monde…
En 2003, moi qui pensais vivre toute ma vie dans mon pays, j’ai rencontré Thierry qui a emporté mon cœur jusque dans la plaine d’Amphion et j’y suis toujours. Mais chaque année je retourne là-bas. J’aime mon pays. On est bien en Ukraine. En 2015, j’ai demandé à ma mère de me rejoindre pour que je puisse vivre le plus longtemps possible avec elle, la seule personne de ma famille. »

Comment avez-vous appréhendé les évènements qui se déroulent dans votre pays ?
« La guerre a été une surprise. La Russie a toujours fait partie de notre vie. J’ai beaucoup d’amis en Russie que je vais régulièrement trouver. Les relations entre humains sont chaleureuses. Deux jours avant la guerre, avec mon amie Russe qui habite également en France, nous faisions ensemble un spectacle dans une maison de retraite en Suisse.
On s’est parlées au téléphone dernièrement, elle est effondrée devant cette situation. Comme nous tous, elle n’arrive pas à comprendre cette circonstance. Les Ukrainiens sont incrédules devant ces faits qui sont pourtant évidents. Même s’ils vivent la situation en direct, ils n’arrivent pas à accepter la vérité que la Russie soit entrée en guerre contre l’Ukraine. »

Comment pouvez-vous être certaine de ce qui se passe dans votre pays ?
« J’ai des informations quasiment en continu sur mon portable. J’ai des amis dans plusieurs villes d’Ukraine. Je sais que l’entraide est continuelle. Certaines personnes vont chercher du ravitaillement en pays voisin, d’autres vont soutenir des gens en difficultés dans les abris, les réseaux se créent et permettent de trouver les médicaments…

L’information dans les médias français est assez proche de la réalité quand je compare avec celle que je reçois sur mon smartphone. Pour les Russes, c’est totalement différent. A chacun sa vérité, comme on dit. On est tous des prisonniers de ce jeu politique. On est des petits pions avec lesquels ils font ce qu’ils ont envie de faire. C’est incompréhensible de savoir comment ils sont arrivés à faire tout cela. C’est grave…
Beaucoup de jeunes garçons ont été trompés. Ils pensaient faire leur service militaire quand ils ont été envoyés en Biélorussie pour réaliser des entrainements. Une fois sur place, ils se sont vu retirer leur passeport, leur téléphone et départ pour l’Ukraine.
L’Ukraine tient le coup car elle est sur son territoire. Mais les Russes, ces pauvres gamins, ne savent pas où ils sont. Les parents ne sont pas avertis alors, quand un soldat Ukrainien prend un soldat russe en otage, il fait une petite vidéo qu’il poste sur internet pour que ses parents puissent savoir où il est. Ce qui déstabilise la propagande russe. Avec les moyens modernes, dans les vidéos, ils changent les paroles des Ukrainiens qui invectivent les militaires russes en leur disant de repartir, qu’ils n’ont rien à faire ici, et les médias traduisent ces paroles en message de bienvenue les amis ça faisait longtemps qu’on vous attendait. On peut comprendre que, pour un Russe, c’est difficile de connaître la vérité sur ce qui se passe réellement. Moi, j’ai de la chance d’avoir la vraie info en direct avec mes amis qui sont toujours sur place. Ma ville, Nikolaiev, est une ville fortement pro-Russe. Maintenant, c’est la ville la plus unie contre cette guerre. Elle empêche depuis 5 jours les Russes de pénétrer dans la ville. Malgré les bombardements incessants, personne n’a encore dit qu’il fallait lever le drapeau blanc. »

Pour ceux qui ont l’application « Telegram » sur leur portable, vous pouvez voir les vidéos que les Ukrainiens postent sur Internet. Attention, âmes sensibles s’abstenir. https://t.me/backalive

Où se trouve l’urgence aujourd’hui pour vous ?
« Mon rôle, c’est d’aider les femmes et les enfants qu’il faut mettre en sécurité. Les hommes sont restés sur place pour défendre leur propriété. Il est de mon devoir de les aider à s’intégrer au mieux, à changer leur pensée car, même s’ils sont là, leur cœur est en Ukraine. Il faudra mettre les enfants dans des activités, dans des lieux de rencontres, peut-être dans des associations qui souhaitent s’investir pour créer du lien social. Il en sera de même pour les mères. Il faudra sortir chacune d’elle de l’isolement dans lequel elle pourrait s’enliser en leur trouvant une occupation, du travail, ne serait-ce qu’un ou deux jours par semaine, bien sûr en fonction de la qualification de la personne, afin qu’elles se sentent utiles. Il faut qu’elles gardent leur dignité.
Dans l’immédiat, il faut trouver des logements, indépendants de préférence, car loger quelqu’un dans son propre foyer quand il n’a pas les mêmes habitudes que vous, ça entraine forcément une ambiance conflictuelle. J’ai de l’espoir car j’ai déjà trouvé deux logements au sein de la famille de mon mari. »

Information sur le spectacle de l’association danse avec Lyudmyla >>>

Coordonnées de Lyudmyla : metla2005@gmail.com 06-87-45-83-60
Toutes propositions d’aide est la bienvenue.

Voir également « Ukraine, comment aider«